J’ai d’abord lu le livre de Sylvain Tesson : « La Panthère des neiges » en 2020 puis vu le film du même titre de Vincent Munier et Marie Amiguet, film sorti en 2021. C’est là que j’ai découvert ce poète de l’image. C’est lui qui m’a fait réaliser le pouvoir émotionnel d’une seule photo.
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Photo prise lors d’une exposition de Vincent Munier à la Saline Royale d’Arc-et-Senans en aout 2024 comme les autres photos qui suivent. |
Vincent Munier est un vosgien. Et comme les Vosges je connais bien, j’ai eu envie d’écrire quelques lignes sur lui et de vous les partager sur le site du club. Il est né à Épinal, habite encore dans les Vosges qu’il n’a quittées que pour mieux y revenir. Il doit à son père de savoir s’émerveiller de tout ce que la nature nous donne à voir et à regarder. Il a appris à l’aimer et à la photographier pour en partager la beauté et la fragilité.
Son travail est reconnu, maintes fois primé, pour ses photos esthétiques, la poésie qui s’en dégage et son engagement pour défendre les richesses de la nature. Il photographie surtout des animaux sauvages dans leur milieu, parfois dans des environnements proches de chez nous, parfois très loin et dans des conditions extrêmes comme au Tibet, en Antarctique, en Alaska. Il explore sans relâche, observe et patiente des mois entiers dans le froid et la neige, sous la pluie, dans ces conditions qu’il partage avec les animaux de ses clichés. Il a préparé longuement de nombreuses expéditions lointaines souvent prolongées par un livre d’images qui témoigne d’un bout de nature là où les hommes ne vont presque jamais. Il nous interroge aussi sur notre place dans cette nature avec ses animaux dont certains disparaissent à jamais.
C’est un artiste qui nous invite à observer des choses toutes simples autour de nous, à apprendre ou cultiver notre patience, à être sur le terrain et surtout ce qui m’a profondément ému c’est qu’il veut avec ses photos faire du bien et apaiser. C’est sans aucun doute ce que j’essaie de faire et c’est un bon guide !
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Voici quelques citations photographiées lors de l’exposition à Arc-et-Senans dans le Jura pour conclure car rien ne le décrit mieux que ses propres mots.

« À 12 ans déjà, Vincent Munier enfourche sa bicyclette, désertant l'univers urbain à l'horizon bouché, pour franchir les portes d'un éden végétal : les profondeurs des bois vosgiens, royaume du sensible, du juste et du naturel. Il cultive vite le goût de se perdre dans la forêt de Chamagne, d'y construire mille affûts tels des postes avancés d'observation animale, d’y bivouaquer pourrait être le témoin unique de la naissance de l'aube.
Sa quête et sa liberté c'est d'avoir l'infini à sa portée et franchir l'horizon à la découverte de la beauté du monde : loups d'Éthiopie, ours bruns du Kamtchatka, grues d’Hokkaido, lapins arctiques… sont attendus patiemment pour être immortalisés à jamais.
Guetteur des vibrations les plus infimes de l'atmosphère il se glisse dans la peau animale, scrutant les moindres rochers des plateaux tibétains pour photographier, filmer la panthère des neiges, fauve caméléon au pelage couleur lichens sombres des pierres. Photographe de l'invisible, de la pluie, de l'air, Vincent Munier délivre une écriture inspirée des estampes japonaises et de l'art minimaliste où la brume, la neige habillent les paysages du grand Nord d'une blancheur infinie transformant les yacks, les bœufs musqués, les harfangs, les loups, les ours… en silhouette fantomatique.
A l'image du loup Vincent a l'art de se mouvoir sans se faire voir, discret et sensible, il se fond dans le temps, les canyons, la neige ; tout est suspendu au mouvement de l'animal sauvage à la confrontation « œil pour œil » pour un émerveillement éternel. »
Autre citation un peu plus loin de l’exposition :
« Se tenir à l'affût, c'est accepter qu'il ne se passe rien. Il fait froid, on respire mal, on se tait, on se camoufle, on s'annule, on finira par oublier sa propre présence, vertu suprême.
On attend l'animal et, contre le dogme du « tout, tout de suite », il conviendra de préférer le « peut-être, jamais », exercice douloureux pour un homme moderne. En voyage, l'espace défile et les jours se succèdent avec leur lot d'imprévus. A l'affût, c'est le temps qui imprime ses infimes nuances. La Lune se lève, un rapace trace sa boucle dans le ciel, une colonne de poussière monte, un mammifère apparaîtra peut-être. Rien n'est moins sûr. Parfois, seul le silence s'offrira à notre patience. La récompense se tiendra dans l'attente elle-même. Quand on aime passionnément la vie, on n'exige pas qu'elle se montre. »
Et celle-ci pour finir et vous laisser avec le regard unique et la philosophie bienveillante de Vincent Munier :
BLANC NATURE :
« Par nature, je suis sensible aux brumes et aux glaces. Les grands draps de l'hiver m'émerveillent ; le blanc me fascine. Ce n'est pas une couleur mais la somme de toutes les couleurs. Ce n'est pas un voile sur le monde, mais un monde en soi. Avec des touches de vie sauvage là où on ne s'y attend pas… ».
« Le blanc… Celui, immaculé, de la neige qui vient de déposer son manteau velouté sur le paysage, arrondissant les formes, atténuant les bruits, apaisant l'esprit. Le blanc, toujours, qui magnifie la nature en soulignant les contrastes, le blanc, enfin celui de l'animal sur la blancheur de la neige : hermine ou chouette harfang, loup et ours blanc. »
Respectueux de la quiétude de la nature, l'objectif du photographe immortalise les scènes de la vie sauvage, des ballons vosgiens jusqu'à l’île d'Hokkaido en passant par l'immensité canadienne. Sur son chemin, bravant l'agitation des tempêtes du grand Nord, l'homme croise les pas d'hermine, de grue ou encore de buffles musqués.
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La photo de nature par Vincent Munier (26 mn) |

